Catégories
Histoire de la Philosophie

Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat Social, livre I

Portrait de Jean-Jacques Rousseau par Maurice Quentin de La Tour (1753)

Cette synthèse traite du livre I du Contrat Social de Jean-Jacques Rousseau.

Nous examinons ce passage sous l’angle de la question : Sur quoi repose la légitimité du pouvoir politique ?

La famille, exemple de référence pour penser la légitimité du pouvoir politique

  • La famille est la « seule [société] naturelle » selon Rousseau (chapitre II). Les autres sont fondées sur des conventions (chapitre I).
  • Le fonctionnement hiérarchique de la famille repose sur le fait que les enfants dépendent des parents pour leur survie. En conséquence, dès que ce besoin disparaît, « le lien naturel se dissout ». Si des liens persistent au-delà, ils ne sont donc plus naturels, mais volontaires.
  • Cette dissolution du lien est selon Rousseau la conséquence de la liberté, qui est une caractéristique naturelle de l’être humain : « [La] première loi [de l’homme] est de veiller à sa propre conservation, ses premiers soins sont ceux qu’il se doit à lui-même, &, sitôt qu’il est en âge de raison, lui seul étant juge des moyens propres à le conserver devient par-là son propre maître. »
  • Ce principe de fonctionnement est « le premier modèle des sociétés politiques » selon Rousseau : « le chef est l’image du père, le peuple est l’image des enfants, & tous étant nés égaux & libres n’aliènent leur liberté que pour leur utilité. Toute la différence est que dans la famille l’amour du père pour ses enfants le paye des soins qu’il leur rend, & que dans l’État le plaisir de commander supplée à cet amour que le chef n’a pas pour ses peuples. »

Élimination de deux fausses pistes pour fonder la légitimité : droit du plus fort et esclavage

  • Rousseau rejette l’idée selon laquelle la force pourrait être la base légitime du droit : un droit basé sur la force ne serait pas durable, il changerait lorsque la supériorité en force changerait de camp. Il ne s’agirait donc pas véritablement d’un droit, mais plutôt d’une forme de la force (chapitre III).
  • Il rejette également le modèle de l’esclavage pour justifier la nécessaire obéissance des sujets aux dirigeants. Il s’oppose ainsi à l’auteur politique Grotius, selon qui un peuple pourrait «  aliéner [sa liberté] & se rendre sujet d’un roi » (formulation de Rousseau au chapitre IV). En effet, la sécurité apparente ainsi gagnée n’en serait pas vraiment une, puisque ce peuple resterait soumis aux desiderata du roi. Plus fondamentalement, l’esclavage lui-même, qui était alors largement pratiqué, n’est pas légitime selon Rousseau : la liberté est inaliénable. Il ne peut donc pas servir de modèle à la société.

Fondation et fonctionnement du « pacte social » ou « contrat social »

  • Le fondement de la société est la constitution du peuple en tant que peuple. Elle a lieu lorsque la vie naturelle rencontre des obstacles tels que l’association devient nécessaire à la survie (chapitre VI).
  • Mais comme la liberté est inaliénable, les rapports de l’individu au collectif vont devoir prendre une forme bien particulière : « […] l’aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté : Car premièrement, chacun se donnant tout entier, la condition est égale pour tous, & la condition étant égale pour tous, nul n’a intérêt de la rendre onéreuse aux autres. » De plus, « chacun se donnant à tous ne se donne à personne, & comme il n’y a pas un associé sur lequel on n’acquière le même droit qu’on lui cède sur soi, on gagne l’équivalent de tout ce qu’on perd, & plus de force pour conserver ce qu’on a. »
  • Le collectif ainsi formé, que Rousseau appelle « le Souverain », est la seule autorité légitime. En conséquence, il ne peut y avoir d’entité qui le contrôle. Il ne peut pas pour autant tout faire. Par exemple, il ne peut pas sacrifier certains de ses membres, ou remettre son pouvoir dans d’autres mains. En effet, cela serait contraire à l’objet du pacte social, et « violer l’acte par lequel il existe serait s’anéantir, & ce qui n’est rien ne produit rien. » (chapitre VII)
  • Par ce pacte, chacun a abandonné sa liberté naturelle, pour recevoir une liberté civile, garantie par le collectif. Il a de même abandonné la possibilité de se rendre possesseur de tout ce qu’il pouvait prendre, en échange de l’établissement d’un droit de propriété, garanti lui aussi par la collectivité (chapitre VIII).

Envie d’aller plus loin ?

Cette synthèse concernant le livre I du Contrat Social de Jean-Jacques Rousseau propose une première approche du texte.

Je serais ravi d’en discuter plus amplement avec vous, par exemple pour vous aider dans votre explication de texte, ou simplement dans votre réflexion. Je pourrai si besoin vous envoyer le texte correspondant, puis nous échangerons à son sujet, par téléphone ou en visio. Vous pouvez prendre rendez-vous, ou me contacter directement à ce sujet. Voir tarifs.

Et pour être informé/e des futurs événements et ateliers, vous pouvez vous inscrire à la newsletter.

Édition de référence

  • Rousseau, Du contrat social, éd. Rey, Amsterdam, 1762. Texte disponible sur Wikisource.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.