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Histoire de la Philosophie

Esquisses Pyrrhoniennes de Sextus Empiricus, livre I, chapitre 14

Sextus Empiricus, d’après une médaille en bronze

Cette synthèse examine le chapitre 14 du livre I des Esquisses pyrrhoniennes de Sextus Empiricus, sous l’angle de la question : Pouvons-nous nous prononcer sur la nature des choses extérieures ?

Les dix modes sceptiques

La philosophie sceptique, à laquelle appartient Sextus Empiricus, conduit à la suspension de l’assentiment, au refus de se prononcer, en particulier sur ce que sont réellement les choses extérieures. Dans le passage qui nous intéresse, Sextus Empiricus liste dix arguments classiquement utilisés par les sceptiques pour justifier cette suspension.

  1. Les différences de constitution des animaux font qu’une même chose est perçue différemment selon l’espèce. Ainsi certaines plantes sont des aliments pour les uns, un poison pour d’autres (§57).
  2. Les différents individus de la même espèce, diversement constitués, ne réagissent pas de la même manière aux éléments extérieurs. D’où, par exemple, chez les humains, la diversité des doctrines philosophiques défendues par les uns et les autres (§88).
  3. Pour un même individu, les sens ne sont pas d’accord entre eux. Ainsi l’huile parfumée est-elle agréable à l’odeur, mais désagréable au goût (§92).
  4. Pour un même sens, l’impression reçue sera différente selon les circonstances. Ainsi le même aliment sera plus ou moins attractif selon que l’on est affamé ou rassasié (§100).
  5. Selon la distance et la position, l’impression reçue sera différente : un navire pourra paraître arrêté de loin, en mouvement de près. Une même tour semblera ronde de loin, carrée de près (§118).
  6. De plus, nous ne recevons jamais des impressions d’un objet isolé, mais toujours de mélanges. Ainsi le flux lumineux traverse-t-il l’air avant d’atteindre notre œil, lui-même composé de diverses substances (§125-126). Nous ne pouvons donc pas savoir ce qui relève de l’objet lui-même.
  7. Selon la quantité et la composition, l’impression reçue sera encore différente. Ainsi la limaille d’argent apparaît-elle noire, alors qu’un morceau d’argent semble plutôt blanc (§129).
  8. Plus globalement, toutes les considérations sont donc relatives à divers points de vue. Les significations du langage sont elles-mêmes relatives (§139), de même que nos perceptions, qui se basent sur la comparaison (§140).
  9. Selon la fréquence des rencontres, notre jugement varie également. Nous accordons ainsi plus d’importance à une comète qu’au soleil, bien qu’elle soit bien plus petite (§141). De même nous donnons plus de valeur à l’or, rare, qu’à l’eau, indispensable mais abondante (§143).
  10. Selon les modes de vie et les coutumes enfin, le même acte pourra apparaître comme impératif ou comme proscrit. Ainsi du sacrifice humain (§149).

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Cet synthèse sur le chapitre 14 du livre I des Esquisses pyrrhoniennes de Sextus Empiricus propose une première approche du texte. Je serais ravi d’en discuter plus amplement avec vous, par exemple pour vous aider dans votre explication de texte, lors d’une séance individuelle.

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Édition de référence

Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes, introduction, traduction et commentaires par Pierre Pellegrin, Paris, Seuil, coll. Points, 1997 ; livre I, chapitre 14, paragraphes 36 à 163. Repris par Gérard Chomienne dans Lire les philosophes, Paris, Hachette Éducation, 2004.

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