Cette synthèse examine plusieurs passages du livre II de De la divination (De diuinatione) de Cicéron sous l’angle de la question : La divination peut-elle avoir un quelconque fondement ?
Impossibilité ou inutilité de la divination
- Cicéron présente la divination comme étant un discours concernant des évènements fortuits, ne relevant d’aucune technique ni savoir (V, 14).
- Dès lors, si le hasard existe, alors un devin peut annoncer à l’avance des évènements fortuits. Mais s’il les prévoit, c’est qu’ils sont certains, et non fortuits. Ce qui est contradictoire (VII, 18).
- Si au contraire il n’y a pas de hasard, alors tout est déterminé, et nous n’y pouvons rien changer. La divination est donc, dans ce cas, inutile (VIII, 20).
Critique de différents aspects de la divination
- Si les dieux voulaient nous envoyer des signes, ils le feraient de façon plus claire, ne nécessitant pas d’interprétation (XXV, 54). Mais les dieux ne veulent peut-être pas notre bien (L, 104). Ou peut-être savent-ils qu’il n’est pas toujours bénéfique de connaître l’avenir (LI, 105). À moins qu’il ne le connaissent pas eux-mêmes, en particulier si tout n’est pas prédéterminé (LI, 106). Enfin, les dieux pourraient bien ne pas exister (LI, 106). L’origine divine de la divination est donc douteuse.
- De plus, ce qu’on appelle « prodiges », miracles, signes, n’a rien d’exceptionnel. En effet, « rien n’advient qui ne puisse advenir ; et si ce qui pouvait advenir est advenu, cela ne doit pas être considéré comme un prodige ; il n’y a donc pas de prodige » (XXVIII, 61).
- L’astrologie, les horoscopes, se fondent sur l’influence de la position des astres au moment de la naissance. Pourtant des personnes nées au même moment peuvent avoir des vies différentes, à l’exemple des jumeaux (XLIII, 90 ; voir aussi XLV, 95). Cette approche semble de plus négliger l’influence plus patente de la météo, du climat et des parents (XLV, 94).
- Par ailleurs, le fait que les rêves puissent être prémonitoires est douteux. En effet, ils ressemblent fort aux hallucinations que l’on peut avoir lorsque l’on est ivre, et peuvent donc être faux (LVIII, 120). Le fait que certains de nos rêves se réalisent peut être le fruit du hasard, puisque nous en faisons beaucoup (LVIII, 121). Par ailleurs, les dieux n’utiliseraient pas les rêves pour communiquer avec nous, étant donné que nous les oublions trop facilement (LX, 125). Ils sont donc plus probablement produits par les mouvements spontanés de l’âme (LXII, 128). Enfin, les interprétations d’un même rêve sont souvent contradictoires entre elles, ils ne sont donc pas informatifs (LXX, 144).
- Cicéron recommande donc de rejeter la divination (LXXII, 149), tout en conservant la religion, porteuse des rites et du respect de la nature, qui soudent la communauté (LXXII, 148).
Poursuivons la discussion !
Cet atelier sur de larges extraits du livre II de De la divination de Cicéron aura été l’occasion de proposer une première approche du texte. Je serais ravi d’en discuter plus amplement avec vous, via les commentaires, ou lors d’une séance spécifique, particulière ou collective.
Le prochain atelier, prévu pour mardi 21 juillet à 19h, s’appuiera sur la Lettre à Lucilius 47 de Sénèque. Il y est question de la pratique de l’esclavage dans l’Antiquité. Contactez-moi dès maintenant pour vous inscrire ou si vous souhaitez plus d’informations.
Et pour être informé/e des futurs événements, vous pouvez vous inscrire à la newsletter ou me suivre sur Mastodon.
Édition de référence
- Cicéron, De la divination – De diuinatione, présentation et traduction de José Kany-Turpin, Paris, Flammarion, collection GF, 2004.
Voir aussi la traduction de Gérard Freyburger et John Schied (Les Belles Lettres, 1992), présente dans le recueil Lire les philosophes de Gérard Chomienne, Paris, Hachette Éducation, 2004.